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Gordon Ramsay, le plus français des chefs british

On doit rencontrer Gordon Ramsay à proximité du château du Roi-Soleil, au Waldorf Astoria Versailles, un palace qui abrite depuis quinze ans l’un de ses restaurants. Mais en approchant de la suite où a lieu l’entretien, on tombe d’abord sur son garde du corps, une armoire à glace au sourire débonnaire. Et quand on accède enfin au cuisinier britannique de 57 ans, les cheveux en pétard, le front creusé de profonds sillons, son agent nous rappelle que l’on dispose seulement de vingt minutes d’entretien. Un accueil digne d’une star hollywoodienne.
De fait, Gordon Ramsay est une star, peut-être le plus célèbre chef du monde. Cela fait vingt ans, depuis le premier épisode de Ramsey’s Kitchen Nightmares, qui a inspiré Cauchemar en cuisine, en 2004, que l’animateur s’est fait un nom en terrorisant les candidats d’émissions télévisées très largement diffusées. Il y a eu Hell’s Kitchen (« la cuisine de l’enfer »), The F Word − on pourrait le traduire par « le mot M… »), 24 Hours to Hell and Back (« 24 heures en enfer et de retour »).
Ces programmes aux titres évocateurs lui ont valu d’être caricaturé en brute impitoyable jusque dans des dessins animés ou des jeux vidéo. Du reste, il s’amuse lui-même de sa réputation : dans un sketch à visée comique, où il joue son propre rôle, on le voit enserrer la tête d’une commise entre deux tranches de pain de mie et lui asséner : « Tu n’es qu’un stupide sandwich ! » Une séquence devenue culte sur Internet.
L’erreur serait de penser que le personnage se résume à un épouvantail. Or, Gordon Ramsay est avant tout un entrepreneur qui a su faire de son nom un label, gage de qualité. « J’ai 89 établissements dans le monde entier, des grands restaurants, des brasseries, des comptoirs de street food, rappelle-t-il. Et mon équipe compte environ 2 500 employés. »
Ce grand sportif – marathonien, ceinture noire de karaté –, à la silhouette toujours affûtée, aime les défis. Il a même réussi à implanter une chaîne de burgers aux Etats-Unis. « Tout le monde pensait que nous étions fous d’ouvrir des restaurants de burgers à Las Vegas, rigole l’homme d’affaires. Nous avons travaillé nos recettes très en amont, et l’un de nos secrets est d’utiliser un beurre très gras, très parfumé, pour caraméliser la garniture. Le succès de nos burgers ne s’est pas démenti depuis dix ans, à tel point que l’on réfléchit à les proposer en France. »
Il reste une question : derrière la vitrine médiatique et cet empire gourmand démesuré, qu’est-ce qui définit la cuisine de ce bateleur capable de vendre des pizzas comme des menus gastronomiques ? Pour y répondre, il faut se pencher sur le parcours du chef, riche en rencontres décisives et en rebondissements.
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